Berthe MORISOT abordait avec une déconcertante maîtrise la technique où elle devait fournir la meilleure mesure de ses dons.

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Berthe MORISOT - (1841-1895)

Berthe MORISOT, Avec Camille Pissarro elle est la seule artiste dont les peintures ont été présentées à toutes les premières expositions impressionnistes.

Berthe MORISOT - (1841-1895).

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Acte de naissance Acte de mariage Acte de décès Tombe Berthe Morisot

Catalogue exposition Berthe Morisot Eaux-Fortes de Berthe Morisot

Les signatures Les livres sur Berthe Morisot Catalogue raisonné B. Morisot

Berthe MORISOT, nulle ombre n’attriste ses tableaux, ses aquarelles, ses pastels, où tout sourit et où tout enchante; je ne me rappelle aucune représentation de la vieillesse qui lui soit attribuable, et l’homme se trouve presque exilé de sa peinture.

 

Il y faut insister, quitte à se répéter sans merci. A quelque moment qu’on le considère, l’art de Berthe Morisot, loin de s’immobiliser, se développe, se diversifie, dans un perpétuel devenir, sans transition brusque et sans préjudice pour l’unité générale de l’oeuvre. Au cours de lu décade qui suit (1882-1892), dans la pleine maturité de l’âge et du talent, la technique change, le répertoire des tonalités s’étend, puis une double préoccupation, en apparence contradictoire, s’atteste d’accorder su dessin une meilleure part dans les travaux et d’atteindre, par l’exaltation des facultés, à une peinture plus aérienne, plus limpide. Si Berthe Morisot semble assez peu différente d’elle-même et de son passé à l’exposition de 1882, déjá des portraits et la Petite fille au corsage rouge, présagent, quatre années plus tard, l’essor des dons vers des fins ignorées. Cette année 1886 est la dernière où les impressionnistes manifestent en société; l’intérêt de la défense collective n’impose plus la nécessité du groupement; leur cause est entendue, sinon gagnée; à les soutenir, nul ne fait plus preuve d’intuition et récolte de gloire; ils reprennent leur place dans l’école moderne entre les novateurs qui tendent, par des moyens autres, à la libre expansion de l’individualité. Dés 1887, lors de l’exposition internationale ouverte à la galerie Petit, les noms de Berthe Morisot, de Claude Monet, de Pissarro, de Sisley alternent, sur le catalogue, avec ceux de Rodin, de Whistler, de Besnard, de Cazin; pareillement la présence de maîtres sans attache avec l’impressionnisme enléve l’apparence d’un isolement volontaire aux ouvrages des ci-devant Indépendants qui paraîtront chez Durand-Ruel su printemps de 1888 (18).

Dans la double occurrence, les acquisitions de Berthe Morisot se font jour; la facture n’est plus martelée, ni floconneuse; l’artiste a réalisé la fusion relative des tons et précisé la cernée du contour; deux portraits, dont l’exécution date de 1888, en témoignent: l’un est le portrait, à curieux reflets verdâtres, de la collection Hayashi; le second est celui de Mme Léouzon-Le-Duc, où le bleu pâli de la robe forme avec le rose perlé du visage et des mains une si précieuse harmonie; la séduction du coloris n’est pas seule à recommander un tel ouvrage: la tenue en est fière; par surcroît, il laisse deviner la priorité de préparations passionnées, passionnantes. Expliquons-nous. Je ne sais pas de période où Berthe Morisot se soit prise à dessiner avec un comparable entrain; elle emploie la mine de plomb, la sanguine, les crayons de couleurs, qu’elle manoeuvre en rayant à peine le bristol; une lithographie en plusieurs tons, la Joueuse de flùte, donne l’idée des effets que tire du procédé l’ingénieuse artiste; leur qualité est d’une délicatesse inattendue. Toujours presque, le souvenir de Berthe Morisot rejoint Ingres, dont Guichard lui a transmis le culte; mais elle assouplit au goùt de sa fantaisie impatiente la rigueur réfléchie et impassible du contour et ce sont de légers croquis, enlevés de verve, qui gardent, sous leurs allures ailées, l’agrément d’instantanés du geste féminin.

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Les huit pointes séches que l’artiste a tracées entre 1888 et 1890 s’accordent à confirmer ce pouvoir d’inscription immédiate de la forme; certes la suite est de mince importance au regard de l’oeuvre gravé d’un Degas, d’un Pissarro ou d’une Mary Cassait; d’ailleurs l’énergie que réclame le traitement de la matière n’est guère le fait de Berthe Morisot et il ne faut voir en ces essais que le caprice d’un amusement passager; n’empêche: ils demeurent pourvus d’attraits et même d’enseignements; ils offrent des versions piquantes de certaines peintures; ici le cuivre est seulement effleuré: à travers la brume grise d’un songe apparaissent les allées du bois de Boulogne, le lac avec la nacelle amarrée, avec les canards en arrêt sur la rive ou les cygnes qui plissent l’eau stagnante; une taille plus profonde silhouette telle attitude, allume l’éclair d’un regard, entr’ouvre les lèvres d’un sourire (la Jeune fille au chat, le Repos, la Toilette). En dehors de ces estampes, il en est une dernière que rendent doublement précieuse le métier et le sujet: elle accompagne ces pages; Berthe Morisot s’y est représentée, prête à dessiner, sa fille à ses côtés; l’attaque du métal a été si alerte et si définitive à la fois, que l’improvisation apparaît fixée en traits indélébiles dans le libre jaillissement du prime-saut.

Berthe Morisot ne se divertit à ces exercices graphiques que dans le but de fortifier son savoir, d’élargir et de simplifier sa technique de peintre. La douceur des clartés diffuses a été, de tout temps, pour la séduire et l’inspirer; ce n’est plus assez, à son gré: elle prétend décomposer le phénomène lumineux, fixer ce qui fuit et ce qui passe; elle rìve d’aborder et de résoudre, à son tour, le difficile probléme des vibrations et des réfractions; sa vision, devenue plus pénétrante et plus subtile, l’y invite; elle se trouve encore entraînée par l’ascendant de Claude Monet, dont l’oeuvre est triomphalement assemblé en 1889, et qui fait bientôt paraître la série fameuse des Meules (l891). Abdiquera-t-elle pour cela la « féminité », qui demeure, en toute circonstance, la marque de son talent? Non, certes. Elle procéde par voie de transposition dans le mode mineur: ni éclat brusque, ni irradiation violente; la lumière a chez elle des timidités, des tendresses, des frissonnements printaniers; à travers l’atmosphére fluide, la forme tremble, s’estompe et se noie; sur les êtres et la nature s’épand une impalpable poussiére d’argent, et c’est une symphonie de nuances azurées, glauques, nei-geuses et cendrées. Telle est la phase des recherches, et tel leur ordre, quand une velléité audacieuse conseille à Berthe Morisot d’en appeler, seule, à l’opinion. Quarante peintures, des pastels, des aquarelles, des dessins choisis se voient, durant le mois de mai 1892, chez Goupil, à l’entre-sol du boulevard Montmartre; les deux salles sont si peu spacieuses, et le jour si discret, que l’illusion naît de quelque réception dans un appartement privé. L’artiste a moins songé à se récapituler qu’á soumettre le dernier état de son labeur; on voit lá les Cygnes, la Vérandah, la Jatte de lait, la Fillette au panier, la Bergére couchée, et sur les plus récents ouvrages de préférence se porte l’examen, se base le verdict. Le paralléle peu opportun avec Manet – mort en 1883 et dont toute action sur Berthe Morisot a depuis longtemps cessé – sévit sans rémission, fournit prétexte à des réserves vaines et même à l’ironie facile. « La houppette a fait son oeuvre », assure le Mercure, « et il a plu quelque poudre de riz dans le bateau des canotiers d’Argenteuil (19). »

Peut-être apporta-t-on quelque excès à censurer ces « molles vapeurs » et ces « colorations délavées » puisque, après l’exposition, Berthe Morisot réagit en sens contraire, et qu’elle s’enrôle délibérément sous la bannière tissée de gemmes d’Auguste Renoir; elle revient à la linéature accusée; la lumière s’épanouit, resplendit et ruisselle avec une intensité inconnue; le ton s’avive, et dans la Fillette au piano, dans le Portrait des enfants Thomas et les Jeunes filles au jardin (1893 et 1894), il revêt la luxuriance du rose franc, du rouge orangé, du bleu marin. Tel un flambeau projette une lueur plus forte avant de s’éteindre et de laisser place à la nuit. Ne croiraiton pas encore que, durant ces années suprêmes, un triste pressentiment pousse la mère à multiplier, comme pour en mieux emporter le souvenir, l’image de la fille charmante qui est devenue sa compagne et dans laquelle Berthe Morisot espére la continuation de son génie (20)?

Tout à coup, le 2 mars 1893, c’en est fait de tant de dons et d’une si belle énergie; l’artiste disparaît, bien avant l’heure, sans bruit et sans hommage, ignorée et célébre à la fois. Dés 1894, lors de la vente Duret, l’État s’était flatté d’assurer une digne représentation de Berthe Morisot au musée du Luxembourg, et son rang parmi les peintres modernes est situé en 1900, quand l’évocation centennale fait entrer l’impressionnisme dans la gloire et dans l’histoire. D’autre part, une piété diligente entretient la ferveur du regret et favorise, par quatre expositions, le contrôle et la revision des jugements de naguère: expositions des travaux laissés, à la mort, dans l’atelier (Durand-Ruel, 1902; Druet, 1907); expositions d’ensemble, autrement édifiantes (Durand-Ruel, 1896; Salon d’Automne, 1907), qui ont permis d’envelopper l’oeuvre dans un regard et de se risquer à en déterminer la portée.

Par une fortune bien rare, Berthe Morisot échappe à la fatalité qui semble vouer l’effort féminin à l’imitation inconsciente et stérile. La vive sympathie qui l’a tour à tour attirée vers Corot et Manet, vers Monet et Renoir n’a point été célée; mais l’inquiétude de l’humeur rendait toute influence innocente, parce qu’instable; puis, si le profit tiré des suggestions étrangéres n’est pas mis en doute, c’est justice de reconnaître qu’il y a eu aussi assimilation et transformation de l’apport extérieur, à la requête d’une volonté lucide et ardente, tendue vers un seul but qu’elle atteint selon l’élan même de la spontanéité. « Berthe Morisot peint des tableaux comme elle ferait des chapeaux », a dit Degas, dans un mot célébre d’où toute intention malveillante est bannie, et qui veut seulement marquer des caractères différentiels, dégager des visées spéciales, et proclamer la prédominance de l’instinct, vraiment ici absolue et souveraine. Au rebours de Claude Monet et d’Auguste Renoir, qui évoluent de l’inconscient vers le conscient, Berthe Morisot demeure, à toutes les minutes de sa carrière, invariablement et également impulsive. Le terme seul d’ « impressionnisme » annonce une manière de percevoir et de noter qui est bien pour répondre à l’hyperesthésie et à la nervosité de la femme. N’a-t-elle pas excellé de tout temps à transcrire sur-le-champ, aussitôt éprouvées, ses sensations intenses, aiguës, mais bréves, rapides, et ne trou-verait-on pas aux ouvrages de Berthe Morisot un équivalent assez exact dans les récits de Mme Alphonse Daudet, dans ses Impressions de nature et d’art et ses Alinéas, par exemple? Chez l’une et l’autre se constate un pareil penchant à s’abstenir des compositions laborieuses, à s’interdire tout effort de longue haleine et à se laisser inspirer, au hasard des jours, par les épisodes de la vie ambiante. Sans tapage, mais non sans émotion, en écartant d’elle-même les images trop graves ou trop profondes, tout ce qui pouvait offenser sa délicatesse ou affliger son optimisme, Berthe Morisot a reproduit la ressemblance de ses proches, la vie du home, puis les spectacles qui avaient retenu son regard au bois de Boulogne, sur les rives de la Seine, et plus loin, lors des villégiatures aux environs de Paris, lors des séjours à la mer, lors des voyages en Angleterre et à Nice.

Nulle ombre n’attriste ses tableaux, ses aquarelles, ses pastels, où tout sourit et où tout enchante; je ne me rappelle aucune représentation de la vieillesse qui lui soit attribuable, et l’homme se trouve presque exilé de sa peinture. Cet ouvre de femme est tout entier consacré à la femme; les seuls êtres qui y paraissent sont des fillettes, de jeunes mères, des enfants, d’heureuses et aimables créatures, appartenant à des milieux d’éducation et de distinction, observées à l’improviste, dans leurs plus fugitives altitudes: elles sont surprises chez elles, tantôt absorbées par la couture, le dessin ou le chant, tantôt occupées tout naivement à se parer, à se mirer, à s’éventer. Et comme Berthe Morisot sait caractériser l’abandon de la rêverie, du nonchaloir, de la causerie, par les accoudements, les allongements, par les souples inflexions du corps, par les retraites diagonales et les renversements paresseux du torse! Avec quelle aisance elle réussit à traduire ce geste « ondoyant et divers » dont l’intelligence et la saisie ont été inexorablement refusées à tant de praticiens réputés, détracteurs haissables du charme, de la grâce et de la beauté!

Chacun a reconnu désormais par où l’oeuvre de Berthe Morisot se singularise et pourquoi il conquiert si délicieusement. Sa personnalité pourrait, j’imagine, se définir ainsi: un talent qui s’est développé, en toute quiétude, selon la logique du sexe, du tempérament et de la classe sociale; un art précieux, d’essence, ou mieux, de quintessence particuliére, à la réalisation duquel se sont victorieusement employés l’appareil de l’organisme le plus vibrant, le plus impressionnable et une sensibilité affinée, maladive presque, privilège héréditaire de l’éternel féminin.

 

Roger MARX - (1859-1913)

 

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(18) On retrouve Berthe Morisot parmi les participants des expositions impressionnistes qui s’ouvrirent hors de France: notamment à Londres (1883 et 1905), à New-York (1886), à Bruxelles (Salons des XX, 1887, et de la Libre esthétique, 1894 et 1904).

(19) Mercure de France, 1892, tome V, p. 260.

(20) Le Salon des indépendants de 1896 a montré d’intéressantes peintures de la fille de Berthe Morisot.

 

"La Gazette des Beaux-Arts" Décembre 1907 - (article de Roger MARX)

 

 

Berthe MORISOT - (1841-1895)

 

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(téléchargement d'une vidéo sur AUVERS SUR OISE)

http://www.guide-touristique.info/tfr/video/auvers.mpg


 

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